Le projet « AGeLi » (Alsace Géothermie Lithium) rassemble Eramet et Electricité de Strasbourg dans l’objectif de valoriser les ressources en lithium contenues dans les eaux géothermales présentes naturellement dans le sous-sol alsacien.
Ageli permettrait ainsi de développer l’un des projets de production de lithium les plus responsables au monde, de contribuer à la souveraineté et la réindustrialisation de la France et de l’Europe sur les métaux critiques, et à la production d’énergie décarbonée par géothermie.
Point d’étape avec Ludovic Donati, Directeur du projet.
Où en est le projet Ageli ?
Ludovic Donati : Les premiers tests réalisés entre 2019 et 2021 appliqués aux eaux géothermales alsaciennes ont prouvé que l’application du procédé breveté d’extraction directe de lithium (DLE), développé par le Groupe pour le projet Centenario, était techniquement possible. Ces tests ont mené à la production des premiers kilogrammes de carbonate de lithium de qualité batterie. Début 2023, nous avons officialisé notre partenariat exclusif avec Electricité de Strasbourg, énergéticien exploitant les seules centrales de géothermies haute température en France, dans le cadre du projet Ageli.
Le projet rentre désormais dans une nouvelle étape avec l’installation d’un pilote au sein de la centrale de géothermie de Rittershoffen, pour une durée minimum de 6 mois, afin de démontrer l’efficacité du procédé et de s’assurer de la stabilité du matériau actif d’extraction de lithium sur la durée et ajuster les paramètres opératoires. En effet, les conditions géologiques des eaux géothermales d’Alsace sont très différentes de l’Argentine : elles sont beaucoup plus chaudes et sous pression.
Cette phase devra permettre d’identifier les risques et opportunités majeurs du projet afin de fournir, en fin d’année 2024, une recommandation pour la prochaine étape de développement du projet.
Comment les rôles sont-ils répartis entre Eramet et Electricité de Strasbourg ?
L.D. : La répartition du projet est égalitaire (50/50), et la direction du projet est assurée par Eramet.
Nous apportons notre expertise sur la valorisation du lithium, avec notamment notre procédé d’extraction directe développé pour le projet lithium en Argentine et le raffinage en carbonate de lithium.
Notre partenaire apporte quant à lui sa solide expertise des eaux géothermales profonde (situées à près de 3 kilomètres de profondeur dans des fractures de granites du bassin rhénan), ses infrastructures de géothermie (2 centrales en opération) et sa connaissance du tissu socio-économique local.
Qu’est-ce qui différencie ce projet lithium et le rend « responsable » ?
L.D. : Le procédé développé par Eramet est très différent des procédés conventionnels.
D’abord, parce que ce projet ne prévoit pas l’ouverture d’une mine au sens traditionnel du terme, puisque nous prélevons l’eau géothermale directement au sein de la centrale. Ensuite, l’impact CO2 du projet est très faible grâce à la réutilisation de l’énergie géothermale en boucle fermée. Il en va de même pour l’eau : le projet en consommera beaucoup moins que les procédés conventionnels et au maximum en boucle fermée.
Sur le plan sociétal, Eramet et Électricité de Strasbourg ont développé depuis longtemps une expertise de concertation et de dialogue auprès des parties prenantes locales, permettant ainsi de favoriser l’acceptabilité du projet.
Eramet travaille dès les phases d’exploration de ses projets avec les communautés locales pour atteindre le niveau d’acceptabilité nécessaire à la bonne conduite du projet. Électricité de Strasbourg, en tant qu’acteur historique de la géothermie dans cette région, connaît bien les acteurs du territoire et a fait de l’acceptabilité un point d’entrée de sa stratégie de développement. Le projet Ageli sera également créateur d’emplois et participera à la réindustrialisation du territoire.
Quelles sont les prochaines étapes du projet ?
L.D. : Nous entamons aujourd’hui les études d’ingénierie préindustrielles, soit les études de « faisabilité technique ». Entre fin 2024 et début 2025, nous envisageons la mise en place d’un démonstrateur à échelle industrielle, en vue d’une décision finale d’investissement fin 2026. En parallèle nous travaillons avec l’administration pour réunir les autorisations réglementaires, et avec les parties prenantes sur l’acceptabilité du projet. Notre objectif pour 2030 étant d’atteindre une capacité production d’au moins 10 000 tonnes de carbonate de lithium par an, ce qui répondrait aux besoins d’environ 250 000 batteries de véhicules électriques chaque année.